Les femmes thaïlandaises.
Je montre beaucoup de plage
et de sable blanc en ce moment parce que le temps m'y incite, mais les
femmes thaïlandaises sont aussi un vaste sujet ;-)
elles seraient réputées pour être de très belles femmes, mais ça
c'est une histoire de goût. En regardant mes photos j'ai bien trouvé
quelques thaïlandaises mais ça n'est pas ce qu'on pourrait
appeler des canons de beauté, mais se trouvant sur notre chemin au
cours de notre séjour, je leur ai forcément fait une photo!
Je suis tombée sur un
article publié par Olivier Languepin et écrit par Michel Picavet
concernant le statut de la femme dans la société thaïlandaise,
très intéressant, voyez!
" De l’époque du roi
Naraï à aujourd’hui, les femmes thaïlandaises ont progressivement
acquis davantage de droits, même si beaucoup reste à faire.
A travers l’histoire du royaume de Thaïlande, les femmes ont
toujours tenu une position sociale inférieure aux hommes: tâches
ménagères, éducation des enfants, satisfaction des besoins du mari à
son retour du travail, gestion du budget familial…
L’influence des
enseignements brahmaniques rend évident l’inégalité des statuts de
l’homme et de la femme, inégalité qui repose sur les codes
hindouistes auxquels se sont ajoutés l’enseignement bouddhiste. Ceci
a entraîné l’adoption progressive du concept patriarcal, basé sur
l’autorité du père, et favorisé la polygamie alors que les
femmes ne pouvaient avoir plusieurs hommes. Cela a aussi influé sur
le statut des enfants qui étaient soumis à l’apprentissage de leur rang.
Selon les normes et lois sociales, les femmes étaient
considérées comme propriété de leur mari et soumises à leur
domination.
Le souverain Rama IV
(1851-1868) introduisit un code juridique qui interdisait aux hommes de
vendre leur femme sans leur agrément. Par ailleurs,
une femme pouvait choisir son propre mari après sa majorité. Rama V
abolit l’esclavage et donna plus de pouvoir aux femmes. Rama VI se fit
l’avocat de la monogamie, mais ceci influença peu les
coutumes. En 1932, la polygamie fut abolie mais beaucoup
d’inégalités étaient maintenues dans la pratique, la loi reconnaissant
toujours l’homme comme le chef de famille. La participation de la
Thaïlande dans le concert des nations et dans les organisations
internationales, après 1945, a poussé le pays à ne plus ignorer les
droits des femmes. Un rôle traditionnel
Les femmes rurales,
gérant le ménage, travaillant avec les hommes et participant aux
décisions familiales, ont joué un rôle important dans le
développement du pays. Durant la période Ayutthaya, le système de
corvée éloignait pour plusieurs semaines les hommes de leurs villages,
et les femmes durant cette absence prenaient en charge la
famille et développaient de petits commerces afin d’améliorer leur
indépendance financière. Dans le Nord-Est, les femmes sont l’élément
fondamental du ménage à travers qui se règle la
transmission des biens. L’influence occidentale a entraîné le
développement de la famille «éclatée» et celui de la monogamie, qui est
devenue la règle juridique, la polygamie devenant très rare
pour des raisons économiques et de succession. Cette influence a eu
aussi pour effet la validation des mariages par des certificats et la
transmission aux enfants du nom du père, l’identification
d’un chef de famille facilitant le contrôle administratif des
populations. Ceci a renforcé le concept patriarcal de l’autorité,
surtout dans les populations urbaines, alors que le système
pratiqué est moins rigide en zone rurale. Les droits et obligations
des individus sont définis d’abord à partir du contexte familial, et le
rôle des femmes est de transmettre ces valeurs et
attitudes à leur famille, en faisant passer à leurs filles la notion
de leurs droits égalitaires avec les hommes, même si la perception que
le rôle central au domicile familial appartient
toujours à la femme. Les filles réalisent des travaux domestiques
non demandés aux garçons, mais elles aident aussi leur père. Les femmes
ont des activités sociales, économiques et religieuses,
les activités au sein d’une communauté villageoise requérant une
coopération et des valeurs communautaires.
Vers une égalité homme/femme
Aujourd’hui, les
Thaïlandaises participent pleinement à la vie du pays, ont une meilleure
éducation et les lois reflètent ces changements. Ainsi,
en 1974, l’équivalence des droits hommes/femmes fut établi, non
seulement pour le bénéfice des femmes mais aussi pour aider au
développement du pays: droit de choisir un domicile, un emploi et,
en 1975, droit des femmes à voyager à l’étranger avec ou sans leur
mari. En 1978, une commission du NESDB (National Economic Social
Development Board) rédigea un «Plan de développement de la
femme» (Women’s Development Plan, WDP) stipulant le même statut pour
tous dans les administrations, la santé, l’éducation, avec des
objectifs quantitatifs. Mais cette commission a davantage un
rôle consultatif qu’un rôle de décision et d’exécution doté d’un
budget. La Thaïlande est devenue membre en 1985 du CEDAW (Convention on
Elimination of all forms of Discrimination Against Women)
et a accepté progressivement le principe des opportunités
équivalentes qui donne les mêmes chances aux femmes d’accéder à des
postes au gouvernement et dans l’administration et à l’éducation… La
constitution de 1997 a permis d’évoluer vers une plus réelle égalité
homme/femme grâce à l’instauration de certains mécanismes. Ainsi, une
commission des droits de l’Homme a été mise en place,
entre autres, pour protéger les femmes. Les violences à leur
encontre (physique, psychologique, sexuelle) qui peuvent se manifester
au domicile, au travail, dans la vie sociale sont en effet
souvent regardées comme une affaire privée et non comme un problème
social. Par ailleurs, les divers projets de développement sur le statut
de la femme ont été entravés par la
bureaucratie.
Le WDP pour
2002-2006 identifie les stratégies pour améliorer le statut des femmes:
transformation des attitudes sociales par le biais de
l’éducation; objectif de 50% de femmes aux «postes décisionnels»
dans l’administration; promotion de l’égalité par de nouvelles lois;
extension des services sociaux aux femmes; promotion des
femmes dans l’activité économique et politique à travers les médias
qui donnent encore un portrait trop traditionnel et sexuel de la femme…
Même si ce plan est indicatif, il témoigne d’une prise
de conscience de plus en plus forte. Un changement d’attitude de la
gente masculine, à savoir l’abandon d’idées préconçues dues à des
facteurs historico-culturels, serait un progrès considérable.
Or l’éradication de la discrimination basée sur le genre ne peut se
faire par des prescriptions, mais demande d’étudier les spécificités de
la société thaïlandaise à travers son histoire, sa
culture et ses valeurs (famille, éducation, religion…).
Éducation :un rattrapage récent
La position sociale
statutairement inférieure des femmes les a conduites à un faible niveau
d’éducation. Dans le passé, les femmes avaient des
opportunités restreintes car elles n’avaient aucun rôle social en
dehors de la famille. Durant la période du roi Narai (1649-1681), la
haute société envoyait les filles en formation au palais,
leur éducation portant sur la littérature, les arts… les femmes du
commun ne recevant pas d’éducation. Ce n’est qu’en 1782, au début de la
période Rattanakosin, qu’elles eurent davantage
d’opportunités éducatives, bien que cela fusse limité aux familles
de la haute société. Cette période fut marquée par une ouverture vers
l’Occident, mais l’essentiel de la littérature de ce
siècle enseigne aux mères d’accepter la soumission au père et de
l’enseigner à leurs filles. Durant le règne de Rama IV (1851-1868),
plusieurs progrès furent enregistrés mais toujours réservés à
la haute société. Les femmes missionnaires étrangères et les femmes
de missionnaires étrangers furent autorisées à enseigner aux jeunes
filles de la Cour, et pour la première fois des femmes
partirent à l’étranger pour compléter leur éducation. La première
femme professeur du royaume fut la princesse Pichitjirabha, qui fonda
l’école de filles Rajini. Sous le règne de Rama V, la reine
accepta la demande croissante des femmes d’avoir l’opportunité d’une
éducation équivalente aux hommes, non pour les concurrencer mais pour
mieux les préparer à éduquer leurs enfants. Les femmes
purent commencer à recevoir une formation supérieure en 1927 avec la
création de l’université Chulalongkorn. Cependant, en 1952, un faible
pourcentage de filles était éligible pour continuer leur
éducation après l’école primaire, comparativement aux garçons.
Selon les sources du
National Statistics Office (Bureau des statistiques), le taux
d’alphabétisation des femmes était d’environ 60% en 1960, puis
de 91% (contre 95% pour les hommes) en 2000. On notera que les taux
d’alphabétisation des 15-24 ans restent stables autour de 98% et sont
équivalents pour les hommes et les femmes (2000).
Concernant le niveau d’éducation, le pourcentage de filles dans les
différents niveaux scolaires (primaire, secondaire, supérieur), selon le
ministère de l’Education, est similaire à celui des
garçons depuis les années 90, ce qui montre l’équivalence des
opportunités d’études pour les filles, qui choisissent en priorité les
arts et la médecine. En Thaïlande, où l’enseignement est basé
sur la transmission d’un savoir – ce qui développe peu l’esprit
analytique et critique – l’éducation se caractérise davantage par une
approche des rôles traditionnels. Selon Suteera
Vichitranonda, présidente de l’Institut de Recherches sur le Genre
et le Développement, l’éducation doit donner aux femmes trois qualités:
la capacité d’agir sur leurs conditions de vie et de se
prendre en charge, la connaissance de leurs droits égaux en matière
d’éducation, d’emploi, de rôle politique et de statut et la possibilité
d’être des agents du changement social grâce aux
médias, aux programmes de développement, à l’enseignement et à une
meilleure représentation dans les organismes de décision. La formation
continue informelle est très variée et constitue une
alternative pour des gens qui ne peuvent pas avoir accès à
l’éducation formelle, ce qui est important pour les femmes notamment
dans le milieu rural. Le ministère de l’Agriculture développe des
programmes de formation, mais le niveau général d’éducation des
femmes dans les campagnes reste globalement assez bas.
Politique et administration :un nouvel espoir
La culture et les
nécessités d’une vie de famille ont maintenu les femmes loin de la
politique. Le rôle des femmes des classes supérieures se
résumait à la pratique religieuse et à former des alliances
politiques. En 1932, les femmes ont obtenu le droit de vote et
l’éligibilité, mais ceci ne s’est pas traduit par un nombre significatif
de femmes élues. Il s’agissait pour l’essentiel d’épouses de leaders
politiques. Mais la tendance est favorable. En 1949, la première femme
fut élue au Parlement, leur nombre passa à 9 (3%) en
1979, puis à 15 (4,2%) en 1992. Les femmes ne sont pas apolitiques.
Ainsi, aux législatives de 1996, elles représentèrent 52,4% des
électeurs éligibles et 53,5% des votants et présentèrent 360
candidates d’âges, de régions, de professions, de niveaux
d’éducation très différents, une grande partie étant des femmes
d’affaires, dont 22 furent élues, soit 5,6% de députés. En 2001, les
femmes représentaient 9,4% des députés (47 sièges) et 10,5% des
sénateurs (chiffres du ministère de l’Intérieur). Si on considère
l’ensemble du personnel politique et de l’administration, on
arrive à une moyenne de 21% pour les cadres au niveau national et à
moins de 10% au niveau local (1).
Aujourd’hui, les
femmes peuvent être considérées comme politiquement actives. Cependant,
le pouvoir de décision et le contrôle des leviers
politiques restent principalement entre les mains des hommes. Leur
rôle dans la vie politique nationale et locale est encore limité et il y
a encore peu de femmes à la direction des partis, des
gouvernements et à la tête des administrations, même si le personnel
féminin est supérieur à 50% dans la plupart des ministères. Dans
l’administration centrale, il n’y a pas de discrimination
féminine pour les promotions mais la pratique fait que leur
avancement est plus lent, même si leur nombre augmente sensiblement. De
même dans des administrations du type «National Statistics
Office», peu de femmes se retrouvent au niveau décisionnel. Pour la
première fois, les autorités ont fixé comme règlement un quota de 50%
pour les femmes dans les comités de gestion des fonds
communaux alloués à chaque village. En 2002, le gouvernement a
approuvé la création d’un poste «pour le respect de l’égalité des sexes»
dans chaque département ministériel et dans chaque agence
gouvernementale. Même si des budgets ont été mis en place, un
problème se pose quant à l’adéquation de ces budgets et à leur pleine
utilisation.
Souvent,
l’engagement politique est plus considéré comme un jeu, permettant
prestige, statut, avantages. Mais les femmes représentent un nouvel
espoir et véhiculent une image beaucoup plus positive sur la scène
politique. Les mouvements féminins, qui luttent d’abord pour la
condition féminine, sont tombés dans des discours
bureaucratiques de gestion de projets et de fait sont souvent
éphémères. Les femmes participent souvent aux mouvements sociaux de
protestation – concernant l’environnement, la politique, les
projets d’infrastructures -, protestations non basées sur
l’inégalité des sexes. Souvent elles réussissent mieux dans les
négociations avec les autorités gouvernementales; plus flexibles, plus
diplomates, plus réalistes que les hommes, elles négocient d’abord
au niveau local et résolvent des problèmes locaux, car elles sont
garantes de la stabilité des villages, et développent
graduellement le niveau de négociation avec les autorités
provinciales puis nationales.
En Thaïlande aussi, la femme est l’avenir de l’homme!
Michel Picavet
Professeur à l’EDHEC, chef de projet Asie, conférencier à ABAC, auteur
de plusieurs articles sur la Thaïlande dans les revues
Péninsule et Journal of ABAC.
(1) Source: Gender and Development Research Institute"
@+
Commentaire:
Alain: Avec tout ça, je n'étais venu chez toi depuis tes
plages idylliques et voilà que la rubrique sur les femmes du pays ouvre
une nouvelle voie dans ce voyage que nous découvrons par petits bouts ;
utiliser le texte d'un spécialiste du pays et l'illustrer est une excellente idée.
Si j'étais un facebooker, j'aurais "aimé".
utiliser le texte d'un spécialiste du pays et l'illustrer est une excellente idée.
Si j'étais un facebooker, j'aurais "aimé".
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