En pause...
- Camille 2014 -
J'aime beaucoup ce texte que j'ai trouvé au hasard d'un surfe, il emmène une réflexion intéressante sur les fumeurs et un de leur passe-temps !!
"FUMER TUE DE L’ART DE FUMER COMME GESTE MÉTAPOLITIQUE."
En voilà une idée!
"Dans Humanités Inc.
Lorsqu’un magistrat tunisien venu
trouver de l’inspiration en France pour l’élaboration d’une nouvelle
constitution vous demande, surpris et angoissé, pourquoi il est partout
interdit de fumer, ajoutant que ça lui fait penser aux intégristes
musulmans qui voulaient interdire l’alcool,
vous vous demandez si ce n’est pas vous qui devriez aller en Tunisie pour en tirer quelques leçons.
vous vous demandez si ce n’est pas vous qui devriez aller en Tunisie pour en tirer quelques leçons.
« Fumer tue ».
Vivre aussi, et à coup sûr depuis notre naissance nous nous
rapprochons toujours plus de la mort. L’étiquetage de ce genre de
slogans, assorti de photos si dégueu qu’elles perdent toute crédibilité
n’a d’ailleurs pas d’effet dissuasif. En témoigne la hausse du nombre de
fumeurs. C’est que l’objectif de l’Etat n’est pas tant de faire en
sorte que les gens ne fument plus mais plutôt de prévenir toute attaque
de la part de citoyens soucieux de prévention en matière de santé
publique. Dans les années 1990, la SEITA (Société nationale
d’exploitation industrielle des tabacs et allumettes), qui n’était pas
encore privatisée, avait reçu des plaintes pour désinformation….
Judiciarisation oblige, L’Etat aura prévenu ! Ne l’emmerdez pas, et
laissez-le récupérer le pognon des produits mortels. Car, en somme, il
s’agit d’allier l’incitation à fumer issue de l’impératif économique, et
l’incitation à ne pas fumer issue de l’impératif public. Quitte à ce
que l’Etat rembourse des produits provoquant des pensées suicidaires
comme le Champix issu des laboratoires Pfizer.
Ban public
Fumer s’inscrivait autrefois dans un rite et dans un temps de loisir, bien loin de notre société de négoce (de nec-otium,
négation du loisir) où la consommation industrielle de la cigarette se
fait sur le trottoir d’un bar ou à une pause dans le temps de travail.
Les pouvoirs publics ne fixent pas de seuils permettant l’usage modéré
de la cigarette, mais créent des zones de bannissement où le fumeur va
être contraint de bannir son plaisir au profit de l’intoxication de
masse. Typique de ce phénomène : les aquariums dans les boites de nuit,
révélateurs des nouvelles stratégies de pouvoir qui consistent, non pas à
réprimer frontalement, mais à mettre au ban. Ce n’est plus l’acte de
fumer qui est combattu, c’est le fumeur lui-même qu’il faut isoler car
il est malade et dangereusement contagieux.
Le ban, le traitement thérapeutique et l’arsenal juridique sont autant d’armes d’un régime néo-libéral dont le modèle social repose sur la défiance, l’infantilisation, et non sur la civilité ou la responsabilité.
Le ban, le traitement thérapeutique et l’arsenal juridique sont autant d’armes d’un régime néo-libéral dont le modèle social repose sur la défiance, l’infantilisation, et non sur la civilité ou la responsabilité.
Du tabac comme acte humain
Comme le rapporte Robert N. Proctor dans La guerre des nazis contre le cancer,
Hitler, dans sa jeunesse, fumait presque deux paquets par jour, avant
de jeter un jour ses clopes dans le Danube et de se promettre de ne plus
jamais toucher au tabac. Il aimait ainsi à raconter qu’il n’aurait
jamais pu mener à bien son projet pour l’Allemagne s’il ne s’était
arrêté de fumer, ce qui peut nous faire douter de la dimension humaniste
de l’hygiénisme. Fumer est une pratique intimement liée à la condition
humaine, ce qui explique par ailleurs son adoption universelle. Comme
l’écrit Guillaume Pigeard de Gurbert, dans son beau livre Fumer tue. Peut-on risquer sa vie ? : « De
même que boire de l’alcool c’est détourner ou sublimer la nécessité
vitale de boire, fumer c’est transcender la fonction respiratoire en
avalant autre chose que de l’air pur. Respirer est une fonction
biologique, fumer est une pratique humaine. » On se souvient aussi
du jardinier dans Le mariage de Figaro répliquant à la comtesse lui
reprochant son penchant pour la picole : « Boire sans soif et faire l’amour en tous temps, Madame, il n’y a que ça qui nous distingue des autres bêtes. »
Mais alors pourquoi une telle chasse aux sorcières ? Pourquoi cette
haine du fumeur ? Lorsque le tabac a été importé d’Amérique du sud en
Europe, on y voyait déjà un produit du diable, comme s’il contenait une
dimension métaphysique susceptible de faire concurrence à la religion
établie. C’est ainsi que le pape Urbain VII édicta une bulle en 1590
menaçant d’excommunication les chrétiens fumant dans les lieux saints
(1624 prêtres en firent les frais) et que Amurat IV, sultan ottoman du
XVIIème siècle, fit carrément condamner à mort les fumeurs au nom du
Coran.
Cette dimension métaphysique est sans doute liée au rapport à un au-delà qui rejoint ce que nous pouvions dire quant à la condition humaine. L’homme a conscience de sa finitude et la transcende grâce à la cigarette dont la fumée s’élève vers les cieux. Non seulement, le fumeur a conscience qu’il flirte avec le danger, mais en plus il l’assume et revendique le droit de se foutre de la mort, dès lors que sa proximité lui permet de savourer pleinement la vie.
Cette dimension métaphysique est sans doute liée au rapport à un au-delà qui rejoint ce que nous pouvions dire quant à la condition humaine. L’homme a conscience de sa finitude et la transcende grâce à la cigarette dont la fumée s’élève vers les cieux. Non seulement, le fumeur a conscience qu’il flirte avec le danger, mais en plus il l’assume et revendique le droit de se foutre de la mort, dès lors que sa proximité lui permet de savourer pleinement la vie.
Occupy tes mains
A l’heure du café sans caféine et de la guerre sans mort, le fumeur
constitue d’ailleurs peut-être la première figure d’une résistance à un
biopouvoir qui entend règlementer sa vie en échange d’une sécurité
mortifère.
C’est peut-être Antonin Artaud qui fut le premier à se lever contre une telle politique : à un député qui était l’auteur d’une loi en 1916 interdisant les stupéfiants, il envoyait une lettre commençant poliment par ces quelques mots : « Monsieur le législateur, tu es un con. » Et dans L’Ombilic des limbes (1925) d’enfoncer le clou : « Les toxicomanes malades ont sur la société un droit imprescriptible, qui est celui qu’on leur foute la paix. »"
C’est peut-être Antonin Artaud qui fut le premier à se lever contre une telle politique : à un député qui était l’auteur d’une loi en 1916 interdisant les stupéfiants, il envoyait une lettre commençant poliment par ces quelques mots : « Monsieur le législateur, tu es un con. » Et dans L’Ombilic des limbes (1925) d’enfoncer le clou : « Les toxicomanes malades ont sur la société un droit imprescriptible, qui est celui qu’on leur foute la paix. »"
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